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mardi 20 novembre 2007

Les maîtres de l’évidence

Ci-dessous la traduction d'un billet de Robert Sutton. La version originale est ici.
Traduction Sabine Rolland

Comme le disait le chanteur Jimmy Buffett : « Certaines choses de la vie sont un mystère pour moi, alors que d’autres choses sont beaucoup trop évidentes. » Cette phrase résume assez bien ce que j’ai appris de l’étude des organisations et de mes efforts pour aider les managers à appliquer les meilleures preuves. Certaines choses sont vraiment difficiles, voire impossibles à résoudre. Prenons le leadership. Il y a de précieux enseignements à tirer de ce que font les bons leaders, mais il est difficile de les découvrir. Tant de foutaises et tant de croyances circulent à travers la littérature managériale, notamment sur les leaderships les plus efficaces, qu’il y aura toujours un auteur pour défendre le bien-fondé de tel ou tel style de leadership. Lorsque Jeffrey Pfeffer et moi-même étions en pleine écriture de Faits et foutaises dans le management, Jeffrey a tapé « The leadership secrets of » (« les secrets de leadership de ») sur Amazon. Le premier livre de la recherche à apparaître fut « The leadership secrets of Attila the Hun » (« Les secrets de leadership d’Attila, roi des Huns »). Le deuxième fut « The leadership secrets of Santa Claus ». Lorsque j’ai recommencé ma recherche, le titre avait été remplacé par « The leadership secrets of Colin Powell ».

En même temps, j’ai développé la conviction suivante : les dirigeants et leurs collaborateurs progresseraient bien davantage si, au lieu d’essayer de résoudre des questions complexes comme « qu’est-ce qu’un grand leader ? », ils concentraient leurs efforts sur des choses à la fois vraies et faciles à mettre en œuvre. Pour citer Jeffrey Pfeffer, le principal « secret » des meilleurs leaders est d’être des « maîtres de l’évidence ».

Prenez mon exemple favori : les réunions où les gens sont debout et celles où ils sont assis. Une étude de l’université du Missouri a comparé des groupes dont les membres restaient debout pendant de courtes réunions (10 à 20 minutes) à des groupes dont les membres restaient assis. Les groupes dont les membres restaient debout mettaient 34% de temps en moins pour prendre une décision aussi bonne que celle des groupes dont les membres restaient assis. Faites le calcul : Combien d’individus travaillent dans votre organisation ? Combien de réunions de 10 à 20 minutes organisez-vous par an ? Certes, dans certaines situations il est préférable de rester assis, notamment pour discuter de questions sensibles. Mais dans la plupart des cas, la position verticale est préférable. Prenez le géant de l’énergie Chevron-Texaco, une entreprise de 50 000 salariés accusée de s’enrichir sur le dos des clients. Si chaque salarié remplaçait une réunion assise de 20 minutes par an par une réunion debout, chaque réunion durerait environ 7 minutes de moins et serait tout aussi efficace. Cela économiserait 6 000 heures travaillées. Vous pourriez supprimer les chaises de certaines salles de réunions et les remplacer par une buvette. Vous économiseriez beaucoup de temps et d’argent.

Ou prenez l’exemple de la médecine. Le cancer et les maladies cardiaques sont difficiles à soigner et la recherche y consacre des milliards de dollars – comme il se doit. Mais certains problèmes peuvent se résoudre avec un peu de savon, d’eau et d’huile de coude. Près de 100 000 Américains meurent d’infections nosocomiales. L’un des moyens les plus efficaces pour faire baisser ce chiffre est d’obliger les médecins à se laver les mains après avoir touché un patient ; or, des études récentes montrent que moins de 50% des médecins se lavent les mains aussi souvent que nécessaire. Certains oublient. D’autres sont débordés. Et d’autres encore ne croient pas aux faits avérés qui existent dans ce domaine. Je connais un hôpital en Floride qui tente de lutter contre ce problème en affichant des symboles et en distribuant aux patients des badges qui disent « Osez demander » – osez demander au médecin s’il s’est lavé les mains avant de vous examiner. Le directeur de cet hôpital m’a confié que les médecins détestent ces badges parce qu’ils n’aiment pas qu’on leur dise ce qu’ils doivent faire. Mais qu’ils oublient moins souvent de se laver les mains !

Certes, il est utile d’essayer de résoudre des problèmes difficiles, par exemple « Qu’est-ce qu’un dirigeant efficace ? » ou « Comment gérer le travail créatif ? ». Mais je suis abasourdi de voir que tant de dirigeants et d’organisations courent après l’impossible et préfèrent ignorer de petites choses simples et évidentes dont les effets peuvent être considérables.

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